L’assurance obligatoire des entrepreneurs bientôt d’application…
Le 1er juillet 2018, les entrepreneurs – à l’instar des architectes – devront obligatoirement souscrire une assurance obligatoire dans le cadre des travaux immobiliers.
Cette mesure concerne les immeubles situés en Belgique, et destinés au logement, pour lesquels l’intervention de l’architecte est obligatoire et pour lesquels un permis d’urbanisme définitif a été délivré après le 1er juillet 2018.
Replaçons la question dans son contexte.
Dans les litiges de construction, il arrive fréquemment que plusieurs fautes émanant de différents intervenants (architecte, entrepreneur, bureau d’études,…) aient un lien causal avec le dommage subi. Dans certains cas, ces fautes – et leurs conséquences – sont à ce point imbriquées qu’il est impossible de définir distinctement l’origine du dommage. Dans une telle hypothèse, le maître d’ouvrage sollicite généralement devant les Cours et Tribunaux de l’ordre judiciaire la condamnation in solidum des intervenants du secteur de la construction.
L’Ordre des architectes s’était plaint de cette responsabilité in solidum puisque cela avait des conséquences graves pour les architectes. En effet, si la responsabilité in solidum était retenue, le Maître d’ouvrage se retournait principalement contre l’architecte pour obtenir le paiement de la totalité de son dommage dès lors qu’il était le seul à être assuré. Le Maître de l’ouvrage était ainsi à l’abri de la faillite de l’entrepreneur. L’architecte pouvait évidemment, en ce qui concerne la contribution à la dette, se retourner vers l’entrepreneur et lui réclamer une partie de ce qu’il avait dû payer au Maître de l’ouvrage mais dans certains cas, cela était impossible…
Dans un arrêt du 12 juillet 2007, la Cour constitutionnelle, saisie par l’Ordre des architectes, a jugé qu’il existait une discrimination entre les architectes et les autres professionnels de la construction. Tout en reconnaissant l’existence de cette discrimination, la Cour constitutionnelle a jugé que celle-ci résidait, non dans la loi de 1939 qui imposait aux architectes de souscrire une assurance, mais dans l’absence d’une loi similaire pour les autres professionnels de la construction.
Pour pallier cette difficulté, les contrats d’architectes prévoyaient régulièrement des clauses excluant la responsabilité in solidum. La Cour de cassation avait toutefois considéré, par un arrêt du 5 septembre 2014, que de telles clauses violaient le principe de la responsabilité décennale – qui est d’ordre public –.
Presque dix ans après l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 12 juillet 2007, le législateur belge est enfin intervenu pour mettre fin à cette lacune législative. La loi du 31 mai 2017 « relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile décennale des entrepreneurs, architectes et autres prestataires du secteur de la construction de travaux immobiliers et portant modification de la loi du 20 février 1939 sur la protection du titre et de la profession d’architecte » a prévu que les entrepreneurs – et tous les autres intervenants du secteur de la construction – seront obligés d’assurer leur responsabilité décennale à partir du 1er juillet 2018. Cette loi instaure donc une assurance obligatoire de la responsabilité décennale dans le chef de tous les intervenants du secteur immobilier, à savoir l’architecte, l’entrepreneur et les autres prestataires du secteur de la construction (défini à l’article 2, 3° de la loi comme « toute personne physique ou morale, autre que le promoteur immobilier, qui s'engage à effectuer, pour le compte d'autrui, moyennant rémunération directe ou indirecte, en toute indépendance mais sans pouvoir de représentation, des prestations de nature immatérielle relatives à un travail immobilier donné sur des habitations situées en Belgique »).
Seule la responsabilité décennale de l’entrepreneur est visée. Les autres responsabilités (par exemple celle pour les vices cachés véniels) de l’entrepreneur ne sont pas visées. Quelques exclusions sont également prévues dans la loi notamment celle relative aux vices apparents mêmes s’ils relèvent de la responsabilité décennale. A défaut d’assurance, la loi prévoit un mécanisme de sanctions, allant jusqu’à des amendes pénales de 26 à 10 000 euros.
Les professionnels de la construction ont donc jusqu’au 1er juillet pour s’affilier à une assurance obligatoire pour la responsabilité décennale.
Expertises liées: Immobilier et urbanisme