Le Conseil d'Etat, le CoDT et le principe de non-rétroactivité
L’article 38 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 mai 2019 modifiant la partie réglementaire du CoDT annulé par le Conseil d’Etat.
L’arrêté du Gouvernement wallon du 9 mai 2019 « modifiant la partie réglementaire du Code de développement territorial », publié au Moniteur belge du 14 novembre 2019, a, on le sait, apporté plusieurs modifications importantes au niveau du CoDT. Outre les formulaires de demande de permis, cet arrêté apporte des modifications ou précisions pour les actes et travaux d’impact limité, au niveau de la nomenclature et du tableau repris à l’article R.IV.1.1. (tableau reprenant les actes et travaux exonérés de permis d’urbanisme, d’impact limité ou ne requérant pas l’intervention obligatoire d’un architecte), du tableau repris à l’article R.IV.35-1 (tableau reprenant les consultations obligatoires dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis) en ce qui concerne les équipements touristiques, ou encore au niveau des avis d’annonce de projet et d’enquête publique,…
L’article 37 de l’arrêté prévoyait une disposition transitoire formulée de la sorte « Les demandes de permis d'urbanisme, de permis d'urbanisation ou de certificat d'urbanisme n° 2 dont le dépôt, attesté par un récépissé ou dont la réception de l'envoi, attestée par un accusé de réception postal ou assimilé est antérieure à l'entrée en vigueur du présent arrêté, poursuivent leur instruction sur la base des dispositions en vigueur à la date du récépissé ou de l'accusé de réception de la demande ». L’article 38 prévoyait, quant à lui, que « Le présent arrêté entre en vigueur le 1er septembre 2019 ».
Fortement critiqué dès sa publication, l’article 38 précité a fait l’objet d’une demande de suspension et d’un recours en annulation devant le Conseil d’Etat.
La Région wallonne soutenait que le jour même de la publication de l’acte attaqué au Moniteur belge, les communes et fonctionnaires délégués avaient été avisés de ce que nonobstant la date d’entrée en vigueur fixée au 1er septembre 2019, le règlement ne pouvait être tenu pour opposable qu’à compter de sa publication, soit du 14 novembre 2019, de telle sorte que l’article 38 attaqué n’avait pas pu sortir ses effets en pratique. Elle précisait encore que l’arrêté n’avait pas été appliqué de manière rétroactive et qu’il n’avait pu, dès lors, causer de grief particulier à la Ville de Châtelet.
Le Conseil d’Etat, dans un arrêt n°248.896 du 12 novembre 2020 – publié au Moniteur belge du 1er décembre 2020 – annule l’article 38 en rappelant les exigences du principe général de non-rétroactivité qui est d’ordre public. Il conclut en précisant qu’ « Il résulte de ce qui précède que l’article 38 du règlement attaqué est illégal. Même si, comme l’affirme la partie adverse, l’arrêté n’a pas été appliqué de manière rétroactive dans la pratique, il y a lieu d’annuler cette disposition pour des raisons de sécurité juridique et tenant compte de ce que le moyen est d’ordre public. Cela aura pour conséquence de fixer l’entrée en vigueur du règlement en cause au 24 novembre 2019. En effet, l’article 84, 2°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles prévoit que « les arrêtés [des gouvernements de communautés et de régions] sont obligatoires à partir du dixième jour après celui de leur publication, à moins qu’ils ne fixent un autre délai » ».
Il n’empêche que pour les demandes de permis ou certificat d’urbanisme n°2 introduites entre les 14 et 24 novembre 2019, la sécurité juridique n’est peut-être pas encore au rendez-vous…
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