Le propriétaire d’un véhicule mal garé doit bénéficier de la présomption d’innocence  - jinterwas - CC BY 2.0
Photo: jinterwas - CC BY 2.0

- Par Bénédicte De Beys

Le propriétaire d’un véhicule mal garé doit bénéficier de la présomption d’innocence

Pour être conforme aux droits de la défense, la présomption d’imputabilité de l’infraction à l’égard des titulaires des plaques d’immatriculation doit être réfragable.

L’arrêt de la Cour constitutionnelle du 9 février 2017 (2017/016) confirme qu’en cas d’infraction notamment en matière de stationnement, les propriétaires des véhicules doivent pouvoir échapper à toute sanction administrative s’ils prouvent ne pas avoir été le conducteur du véhicule au moment de l’infraction. Le principe de la présomption d’innocence garanti par l’article 6, § 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme s’applique en effet également en matière de sanctions administratives.

L’arrêt concerne le infractions dites « mixtes », à savoir dont le comportement incriminé est défini par l’Etat fédéral mais dont la sanction est établie par une ordonnance ou un règlement communal. C’est le cas des infractions aux dispositions relatives à l’arrêt et au stationnement ainsi qu’aux signaux C3 et F103 (en vertu de l’article 3, 3°, de la loi du 24 juin 2013 relatives aux sanctions administratives communales qui autorise les conseils communaux à édicter des sanctions administratives en la matière).

La question préjudicielle posée à la Cour pointait en effet la discrimination entre :

  • d’une part, les propriétaires de véhicules sanctionnés dans le cadre de la loi du 24 juin 2013 dont l’article 33 précise que, pour les infractions mixtes précitées, l’amende administrative est, en cas d’absence du conducteur, mise à charge du titulaire de la plaque d’immatriculation du véhicule, sans possibilité pour ce dernier de renverser ultérieurement la présomption établie à son égard en prouvant que le conducteur au moment des faits n’était pas lui ;
  • et d’autre part, les propriétaires de véhicules sanctionnés dans le cadre de loi relative à la police de la circulation routière dont les articles 67bis et 67ter organisent une présomption réfragable de culpabilité, pouvant être renversée par tout moyen de droit.

La Cour constate en effet que l’atteinte à la présomption d’innocence des titulaires des plaques d’immatriculation concernés est disproportionnée et ne permet pas d’atteindre l’objectif de l’article 33 de la loi du 24 juin 2013 visant à sanctionner l’auteur réel des faits.

Toutefois, la Cour n’annule pas l’article 33 de la loi du 24 juin 2013 mais suggère une interprétation conforme de cet article qui doit en effet être lu en combinaison avec l’article 29 de ladite loi, lequel permet que le contrevenant puisse faire valoir ses moyens de défense auprès du fonctionnaire sanctionnateur.

Cet arrêt est intéressant à plusieurs titres car sa rédaction extrêmement claire rappelle non seulement le principe des infractions mixtes mais surtout le caractère répressif des amendes administratives justifiant que celles-ci soient infligées dans le respect de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme. En effet, s’il est possible que les garanties du droit à un procès équitable puissent le cas échéant être altérées, voire supprimées, en cas d’amendes administratives, l’atteinte portée à ce droit doit toujours être justifiée et proportionnée.

Expertises liées: Economie et finances publiques