Les multiples droits d’expression des bruxellois devant les autorités communales - © "Collectif Citoyen" 2024
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- Par Bénédicte De Beys

Les multiples droits d’expression des bruxellois devant les autorités communales

Le 22 février 2024, a été adopté par le Parlement bruxellois une ordonnance modifiant la Nouvelle loi communale, notamment afin d’y consacrer un « droit d’expression des citoyens » (articles 317/1, 317/2 et 317/3 NLC).

Ces formes d’expression des citoyens par rapport aux autorités communales sont de trois formes :

  • La pétition :

Ce droit d’expression des citoyens se veut une application au niveau communal de l’article 28 de la Constitution :

« Chacun a le droit d’adresser aux autorités publiques des pétitions signées par une ou plusieurs personnes.

Les autorités constituées on seules le droit d’adresser des pétitions en nom collectif ».

Comme le rappelle la section de législation du Conseil d’Etat dans son avis, ce droit ne peut être soumis à aucune condition de quelque nature que ce soit dans la mesure où la Constitution n’en précise aucun.

  • Le droit d’interpellation (déjà précédemment visé par l’article 89bis de la NLC) :

Toute demande d’interpellation doit émaner de minimum vingt-cinq habitants de la commune.

Pour être recevable, l'interpellation doit contenir les éléments suivants:

1° être rédigée en néerlandais ou en français;

2° porter sur:

- un sujet d'intérêt communal au sens de l'article 117;

- un sujet relevant de la compétence de décision du collège ou du conseil communal;

- un sujet relevant de la compétence d'avis du collège ou du conseil communal dans la mesure où l'objet de cette compétence concerne le territoire communal;

3° être de portée générale;

4° être conforme à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

5° ne pas porter sur une question de personne;

6° ne pas revêtir un caractère raciste, xénophobe ou discriminatoire;

7° ne pas constituer une demande d'ordre statistique;

8° ne pas constituer une demande de documentation;

9° ne pas avoir pour unique objet de recueillir une consultation d'ordre juridique;

10° ne pas concerner une matière qui relève des séances à huis clos;

11° ne pas figurer déjà à l'ordre du jour du conseil;

12° ne pas avoir fait l'objet d'une demande au cours des six derniers mois;

13° ne pas être déposée dans une période de six mois précédant les élections communales.

Comme le rappelle les travaux préparatoires de l’ordonnance (doc. A-808/1 -2023/2024) : « en Région wallonne, le seuil du nombre d’habitants est plus bas: l’interpellation peut être déposée par une seule personne. Les conditions de recevabilité sont définies à l’article L1122-14, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation ».

Lorsque les autorités communales sont saisies d’une interpellation, le collège analyse la recevabilité de l’interpellation.

Si l’interpellation est recevable, le Collège dispose de l’alternative suivante :

  • soit de renvoyer l’interpellation au conseil communal : dans ce cas le point est mis à l’ordre du jour de la prochaine séance et Le bourgmestre ou le membre du collège ayant ce point dans ses attributions répond à l'interpellation séance tenante ;
  • soit d’organiser une troisième forme d’expression citoyenne (visée à l’article 317/3) en créant une médiation avec les signataires en vue d’une discussion permettant d’aboutir à une solution concertée sur le sujet.
  • La médiation :

Le Collège peut être à l’initiative de la mise en place d’une médiation OU cent habitants d’une commune peuvent introduire une demande de médiation auprès du collège aux conditions de recevabilité d’une demande d’interpellation précédemment citées.

Si le collège décide de mettre en place une médiation ou juge recevable la demande des habitants, il organise au moins une réunion dans le mois suivant sa décision d'entamer la médiation.

Le collège des bourgmestre et échevins rédige un compte rendu à l'issue de la procédure de médiation.


Au plus tard six mois après la mise en place de la médiation, la commune communique à ce sujet pour informer les citoyens:

1° que la médiation a abouti, ou

2° qu'aucun accord n'a pu être trouvé, ou

3° que la médiation est toujours en cours et que des informations complémentaires suivront à l'issue de la procédure et en tout cas dans les six mois.

Au terme d’une première analyse, on ne peut que se réjouir de l’initiative bruxelloise visant à créer toujours plus de participation citoyenne et de ponts entre les élus communaux et les habitants. Toute décision du Collège communal d’irrecevabilité d’une demande d’interpellation (et vraisemblablement d’une demande de médiation, il n’est en effet pas renvoyé à cet alinéa de l’article 317/2 NLC pour la médiation) devra être spécialement motivée en séance du conseil communal. Et pourra bien entendu faire l’objet d’un recours le cas échéant devant le Conseil d’Etat.

Expertises liées: Gestion publique et textes légaux