Big Brother is watching you - C.E., 14 octobre 2016, n° 236.129
Dans la plus pure tradition orwellienne, le Conseil d’Etat impose aux voisins d’un projet urbanistique une surveillance active du titulaire du permis en vue, afin d’observer si le permis risque d’être mis en œuvre.
La jurisprudence du Conseil d’État exige du requérant qu’il agisse avec une grande diligence dans l’introduction de d’une demande en suspension au bénéfice de l’extrême urgence (C.E., 11 juillet 2014, n° 228.060, Hoeylaerts et Sergeant), le défaut de diligence entrainant l’irrecevabilité de la requête.
Il n’est pas aisé de circonscrire, en l’absence d’une définition claire, en matière d’urbanisme, ce qu’il convient d’entendre par grande diligence dont doit faire preuve le demandeur en suspension d’extrême urgence. Dans quelles circonstances, à quel moment, et dans quels délais convient-il de saisir la juridiction ?
Le Conseil d’État a, dans un arrêt récent (C.E., 14 octobre 2016, n° 236.129, Gaillard), levé un coin du voile. Il considère en effet que le requérant doit vérifier de manière proactive si et quand le permis d’urbanisme risque d’être mis en œuvre.
Dans ce même arrêt, le Conseil d’État invite les requérants qui n’obtiendrait pas l’assurance que le permis ne sera pas mis en œuvre dans l’intervalle de la procédure, à introduire une demande en suspension concomitamment à l’introduction de la requête en annulation.
Il leur serait ainsi loisible d’introduire une demande de suspension selon la procédure d'extrême urgence, comme l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d’État l'y autorise, si les travaux commencent avant qu'un arrêt soit rendu sur la demande de suspension, irrecevable à défaut.
Cet arrêt du Conseil d’État consacre donc le maintien du système antérieur. Pourtant, la ratio legis de la réforme de 2014 était justement de mettre fin à ce système … une occasion manquée ?
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